Vous avez 56 ans et vous avez travaillé fort toute votre vie. Aujourd’hui, vous méritez un petit velours. Vous voulez vous payer du beau, mais vous hésitez entre rénover la cuisine, partir une semaine en croisière, ou acheter un chalet à Sutton. Financièrement parlant, quelle est la meilleure option, sachant que la retraite vous fait des yeux doux depuis quelques années?
Autrefois, la devise était simple : pas de dettes quand tu prends ta retraite. C’est d’ailleurs ce que la plupart des conseillers financiers définissent encore comme la recette idéale. Logique direz vous : on a les poches moins profondes quand on ne reçoit plus de paye aux deux semaines. À la retraite, une fois les loisirs, les projets spéciaux, et les médicaments payés, l’excédent est souvent maigre pour les paiements d’hypothèque ou d’intérêts du dernier voyage qu’on a payé à crédit.
Pour une retraite minimalement stressante et maximalement plaisante, il est donc préférable de régler ses dettes au préalable (pour pouvoir léguer quelque chose d’intéressant à ses héritiers, aussi). Plus facile à dire qu’à faire? Probablement. En plus d’avoir plus de bâtons dans les roues pour épargner, les retraités d’aujourd’hui n’ont plus la mentalité, ou même simplement l’option, de liquider leurs dettes avant de partir à la retraite.
Plus facile à dire qu’à faire
Les retraités qui occupent aujourd’hui les résidences sont plusieurs à avoir adopté un train de vie différent de celui que leurs parents vivaient anciennement : ils font tout plus tard. Ils ont reporté l’achat d’une propriété en raison d’une dette d’études ou du marché défavorable. Ils ont eu des enfants plus tard, et donc se retrouvent encore à financer leurs études ou celles de leurs petits-enfants. Ils vivent seuls et payent des pensions alimentaires parce qu’ils ont divorcé après plusieurs années de mariage. Il y en a même qui se sont endettés sans le savoir en bricolant quelques rénovations ici et là dans la maison.
Qu’importe la combinaison de circonstances, les épargnes en vue de la retraite ont pris le bord. Une enquête de l’Association canadienne de la paie a révélé que trois Québécois sur quatre considèrent avoir accumulé moins du quart de ce dont ils auront besoin au moment de prendre leur retraite. Résultat : les dettes ne seront pas remboursées, et les revenus vont baisser. Faites le calcul.
Une bonne dette, ça existe?
Avant de faire chauffer la carte platine, il faut savoir que toute dette n’est pas nécessairement « mauvaise ». Un conseiller du syndic de faillite Raymond Chabot Grant Thornton explique que, si on possède un actif une fois les paiements complétés (on pense à une cotisation à un REER ou un emprunt hypothécaire), la dette a moins de potentiel de mener au surendettement que celle d’une location de voiture de luxe ou d’un voyage à rabais. Autrement dit, tout ce qui est éphémère et qui coûte les yeux de la tête en intérêts est considéré comme une mauvaise dette. C’est là qu’on vous laisse la chance de réviser votre réponse à la question qui a ouvert cet article.
« Être plus futé que le crédit », comme on dit
Quoi qu’il en soit, la réticence à parler de ses problèmes financiers est particulièrement observée chez les personnes âgées. Tandis que, depuis une vingtaine d’années, le nombre d’héritiers qui refusent leur succession parce qu’ils ne reçoivent que des dettes croît rapidement, les retraités continuent d’avoir tendance à garder la situation loin des yeux de leurs enfants. Pendant ce temps, personne ne se doute de quoi que ce soit, et les petits-enfants continuent de recevoir des cadeaux Noël après Noël, comme si de rien n’était.
Des outils existent pour prévenir la situation ou la guérir, outre bien sûr le classique budget personnel qu’on peut planifier à l’aide d’un conseiller financier ou d’outils en ligne. Le programme Des communautés plus futées que le crédit, par la Coalition des associations de consommateurs du Québec, mène par l’exemple en suggérant d’avoir recours à la consommation collaborative pour alléger ses dépenses. Les solutions couvrent l’alimentation, le logement, les loisirs, et le transport, avec des idées comme des coopératives d’habitation, des jardins communautaires, et des maisons de la culture. C’est donc dire qu’avec une touche de créativité, il est fort possible d’atténuer le fardeau financier que peut occasionner la retraite. Mais être créatif, c’est plus facile quand on partage le problème et qu’on le défie à plusieurs.